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Qui paie le remplacement des fenêtres? Le syndicat de copropriété doit respecter les dispositions du Code civil du Québec

Qui paie le remplacement des fenêtres? Le syndicat de copropriété doit respecter les dispositions du Code civil du Québec

Dans un jugement récent de la Cour du Québec, division des petites créances1, le Tribunal a rappelé à un syndicat de copropriété qu'en l'absence d'une disposition expresse dans sa déclaration de copropriété, que ce n'est pas aux copropriétaires de payer le coût de remplacement de leurs fenêtres, mais plutôt au syndicat en employant son fonds de prévoyance.

Les prétentions des parties
Les demandeurs, qui sont les propriétaires d'une unité de condo dans un immeuble en copropriété divise, réclament 2 448,83$ à leur syndicat des copropriétaires, soit le coût de remplacement des fenêtres de leur condominium (1 948,83$) et des dommages-intérêts pour troubles et inconvénients (500 $).

Pour sa part, le Syndicat conteste la demande au motif qu'il a adopté et mis en place un programme qui incombe à chacun des copropriétaires d'assumer le coût de remplacement des fenêtres de son unité. Cette mesure est adoptée en vue d'éviter le versement d'une cotisation spéciale. Il prétend que les demandeurs ont adhéré à ce programme et qu'ils ne peuvent exiger que le syndicat les rembourse.

Les faits saillants selon le Tribunal
Les demandeurs sont les propriétaires d'un des 48 condominiums faisant partie du syndicat dont la déclaration de copropriété a été publiée en 1990.

En 2004, le Syndicat est informé pour la première fois, que les fenêtres coulissantes se trouvant dans les chambres de toutes les unités de condominium achèvent leur vie utile. Toutefois, le syndicat planifie déjà un projet important de réfection de la toiture, et une cotisation spéciale est prévue. La cotisation spéciale est nécessaire car les fonds disponibles dans le fonds de prévoyance sont insuffisants pour le projet de réfection de la toiture.

Afin d'éviter de devoir gérer les deux projets en même temps, ainsi que d'éviter une cotisation spéciale additionnelle, le conseil d'administration adopte une résolution à l'effet que les copropriétaires pourront changer leurs propres fenêtres sur une base volontaire à leur frais. Pendant les années qui suivent, plusieurs copropriétaires agissent en ce sens et font remplacer leurs fenêtres à leur frais.

En 2008, le nouveau gestionnaire immobilier engagé par le syndicat remet en question le programme du syndicat, car selon ses connaissances et son expérience en gestion des copropriétés, le programme ne semble pas respecter la déclaration de copropriété. En effet, il constate que les fenêtres des unités font partie des parties communes à usage restreint de l'immeuble, et qu'il n'y a aucune disposition expresse de la déclaration de copropriété à l'effet que les copropriétaires doivent faire changer leurs fenêtres eux-mêmes, ainsi que de payer le coût des travaux.

Selon ce qu'il connaît, les fenêtres de ce syndicat sont des parties communes réservées à l'usage exclusif des copropriétaires. Selon le gestionnaire, le remplacement des fenêtres doit être pris en charge par le Syndicat et payé à même le fonds de prévoyance ou encore par une cotisation spéciale, le cas échéant.

Le gestionnaire en fait part au conseil d'administration du syndicat, qui décide qu'il y a lieu de préciser les règles de son programme aux copropriétaires qui n'avaient pas encore procédé au changement de leurs fenêtres. En fait, le syndicat détermine une date butoir pour le changement volontaire de fenêtres, après quoi le syndicat n'aura pas d'autres alternatives que de procéder lui-même au changement des fenêtres de ceux qui auront négligé de le faire, et de réclamer le coût des travaux aux copropriétaires concernés. La date butoir est fixée au 31 décembre 2012.

Le 3 août 2012, les demandeurs demandent au syndicat de remplacer seulement les vitres de deux fenêtres de leur unité, lesquelles sont embuées. En septembre 2012, le syndicat refuse cette demande, car à son avis, ces copropriétaires doivent les faire changer eux-mêmes et à leur frais avant la date butoir du 31 décembre 2012.

Les demandeurs décident de changer les fenêtres à leur frais afin de satisfaire aux conditions d'une offre d'achat sur leur unité. Ils paient 1948,83$ taxes incluses.

Par la suite, les demandeurs déposent une action en justice contre le syndicat le 29 novembre 2012 afin de réclamer à ce dernier le remboursement du coût de remplacement des fenêtres (1 948,83$), plus des dommages-intérêts de 500 $ pour les troubles et inconvénients qu'ils ont subis. Ils témoignent à l'audience qu'ils estiment qu'ils ont dû faire face à des inconvénients imprévus qui ont ralenti le processus de vente de leur condominium.

Les demandeurs soutiennent qu'il est de la responsabilité du Syndicat de procéder, à même le fonds de prévoyance ou à partir d'une cotisation spéciale, le cas échéant, au remplacement des fenêtres qui sont définies comme une partie commune dans la Déclaration de copropriété. Pour sa part, le syndicat soutient que, selon son interprétation de l'article 1064 du Code civil du Québec, que les copropriétaires doivent assumer toute charge liée à une partie commune à usage restreint, et que son programme respecte ce principe.

ANALYSE ET DÉCISION
Après son analyse de la preuve, le Tribunal constate ce qui suit :
Selon le Tribunal, le Syndicat ne respecte pas les dispositions applicables de la Déclaration de copropriété et les articles 1064, 1071 et 1072 du Code civil du Québec, lorsqu'il met en œuvre son programme de remplacement volontaire des fenêtres.

La Déclaration de copropriété, remarque le Tribunal, établit que les fenêtres sont des parties communes, que chaque copropriétaire a l'usage exclusif des fenêtres auxquelles sa partie exclusive donne seule accès, et qu'il a droit d'utiliser et de jouir exclusivement de la surface intérieure de ses fenêtres. Suivant son analyse des dispositions pertinentes de la déclaration de copropriété, le Tribunal conclut qu'aux termes de la déclaration de copropriété, les charges communes de cette copropriété comprennent l'entretien, le nettoyage, le remplacement et l'opération des parties communes et des parties communes réservées à l'usage exclusif de copropriétaires déterminés. Ces charges sont réparties entre les copropriétaires selon la quote-part des charges de chacun.

Le Tribunal fait remarquer aux parties que la Déclaration de copropriété n'autorise pas le Syndicat à déléguer aux copropriétaires la responsabilité de remplacer eux-mêmes les fenêtres qui sont des parties communes. De plus, la Déclaration de copropriété ne prévoit pas un traitement différent pour les parties communes lorsque ces dernières sont à usage exclusif.

Selon le Tribunal, l'article 1064 du Code civil du Québec doit être interprété selon le raisonnement existant mais réitéré récemment par la Cour d'Appel2 , à l'effet que le terme « charges », utilisé à l’article 1064 C.c.Q., ne vise que les dépenses mineures de réparation et les coûts d’entretien liés à l’utilisation des parties communes, et non pas les réparations majeures et le remplacement de ces parties.

Le Tribunal précise que la Déclaration de copropriété ne prévoit pas que les charges liées aux parties communes à usage restreint doivent être exclusivement assumées par les copropriétaires qui en ont l'usage, et donc il ne peut s'appuyer sur l'article 1064 du Code civil du Québec pour valider son programme volontaire de remplacement des fenêtres.

Le Tribunal conclut que les demandeurs ont droit au remboursement des frais de remplacement de leurs fenêtres, soit 1 948,83$.
Quant à la réclamation des demandeurs en dommages-intérêts, le Tribunal conclut que la preuve entendue à l'audience ne justifie pas l'octroi de tels dommages.

Pour ces raisons, le Tribunal a condamné le Syndicat des copropriétaires à payer aux demandeurs la somme de 1 948,83$ avec les intérêts au taux légal ainsi que l'indemnité additionnelle, plus les frais de la demande au montant de 103 $.

Pour toute question en droit immobilier, n'hésitez pas à communiquer avec notre équipe de juristes spécialisés en la matière.

1. 2014 QCCQ 11438, numéro de cour 550-32-020719-123
2. Gestion Almaca c. Syndicat des copropriétaires du 460 St-Jean, 2014 QCCA 105

Me Kevin J. Lebeau, avocat

Diplômé de l'Université McGill (B.A.) et l'Université de Montréal (LL.B.), Me Lebeau est membre du Barreau du Québec depuis 2000.

Depuis 2001, il a exercé en droit immobilier avec concentration en droit de la copropriété dans plusieurs contextes, dont en milieu d'association, en société et en contentieux d'entreprise au sein d'une firme de gestion se spécialisant dans la gestion des copropriétés divise, Gestion Immobilière Ges-Mar Inc. Me Lebeau est également conseiller juridique aux membres d'Avantages Condo.

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