Qui n'a pas un jour rêvé de devenir propriétaire d'un condo en Floride? Le taux de change étant beaucoup plus favorable qu'il y a quelques années, le prix des maisons ayant également chuté de façon spectaculaire aux États-Unis, il semblerait qu'un canadien sur cinq aimerait acquérir une propriété dans ce pays, selon un sondage Léger Marketing pour le compte de BMO. L'économie américaine finira par reprendre ses forces et par le fait même, le capital détenu aux États-Unis aussi; il s'agit donc de prime abord d'une situation favorable aux achats à l'extérieur du Canada. Des rêves qui pourraient donc devenir réalité, semble-t-il.
Bien que l'impôt sur le revenu et votre testament soient les dernières choses auxquelles vous pensez lorsque vous partez profiter du soleil, rappelez-vous que comme l'a dit Benjamin Franklin, «en ce monde on ne peut dire que rien est certain, excepté la mort et les impôts». Il est important de savoir que lorsque vous traversez la frontière canadienne (et même québécoise), vous entrez également dans une toute autre entité autant au niveau juridique que fiscale. Notamment, le financement pour cet achat aux États-Unis serait soumis à des règles différentes.
Entre autres choses, tout dépend de comment vous entendez utiliser cette résidence: y vivre une partie de l'année, louer l'autre partie? Si vous gagnez un revenu de location de l'autre côté de la frontière, il se pourrait bien que ce revenu, aussi intéressant soit-il, doive être déclaré autant au Canada qu'aux États-Unis. Si vous achetez un immeuble à revenus, il vous faudra une personne pour en faire la gestion, sans compter que vous n'avez pas le droit de faire vous-même les rénovations, à moins d'obtenir un visa à cet effet.
Si vous passez beaucoup de temps aux États-Unis, vous pouvez en être considéré comme résident ! Notre droit permet effectivement au niveau fiscal d'être résident de deux pays. Qui veut dire résident de deux endroits, veut également dire double imposition, que vous louiez votre logement ou non. Les nouvelles règles américaines à ce sujet donnent droit à un maximum de 183 jours de séjour au cours de l'année et des deux précédentes, en comptant une partie seulement des journées des séjours de ces deux dernières années, avant d'être considéré comme étant résident. Si le total dépasse ce 183 jours, vous pourriez avoir à payer un impôt sur votre revenu au fisc américain. Il existe des conventions entre nos deux pays pour amoindrir cette double imposition, mais il reste que c'est pénalisant.
Également, le gain en capital résultant de la revente de la résidence devra encore être déclaré dans les deux pays, que vous soyez considéré ou non comme étant résident, il en résultera donc des pénalités qui amoindriront votre véritable gain.
Finalement, pensez aux impacts que des biens outre-frontières peuvent causer lors de votre décès. Le règlement de votre succession peut s’en trouver retardé et beaucoup plus coûteux pour les membres de votre famille. Si vous achetez l’immeuble à deux, les lois sont différentes dans plusieurs états des États-Unis : il existe une forme de copropriété, communément appelée le «joint tenancy» qui empêche de léguer le bien par testament comme vous le désirez. Votre part dans la résidence sera donc dévolue automatiquement au dernier vivant des copropriétaires, peu importe si vous vouliez la lui léguer ou non. Il s’agit d’une règle qui entre en contradiction avec les principes de liberté de tester du Québec et il faudrait alors, pour y déroger, un jugement au Québec qu’on devrait faire reconnaitre aux États-Unis ou, dans la mesure du possible, un partage qui rectifierait les parts de chacun dans la succession en conséquence.
En étant conscient de ces problématiques, il est toujours possible de profiter d'une résidence aux États-Unis en faisant une bonne planification juridique, fiscale et testamentaire. Il demeure important de consulter un avocat ou un notaire au Québec avant de procéder à cet important investissement.